2 semaines. Soit une semaine de plus que ce qu’a eu le Nouveau Front populaire pour conclure un accord après l’annonce de la dissolution par Emmanuel Macron le 9 juin 2024. Le NFP a en outre eu une semaine de campagne en moins pour convaincre par rapport à la séquence de 1997.
En 1997, la dissolution surprise est déclarée le 21 avril, les élections législatives sont fixées aux 25 mai et 1er juin. Le PS, le PCF et les Verts disposent de deux semaines pour conclure un accord sur les circonscriptions (désignation de candidats uniques là où c’était nécessaire) et définir un cadre politique commun avant le dépôt des candidatures le 4 mai 1997. Ce cadre est devenu la référence pour les orientations politiques et sociales de ce qui allait être connu sous le nom de «gauche plurielle». Cette dénomination souligne la diversité des composantes, incluant notamment la participation des Verts, membres pour la première fois d’une telle alliance des gauches. Avec 319 sièges (43,1% des voix au premier tour), la gauche plurielle a gouverné toute la législature de 1997 à 2002. Le gouvernement dirigé par Lionel Jospin comprenait trois ministres communistes : Jean-Claude Gayssot aux Transports, Marie-George Buffet à la Jeunesse et aux Sports, et Michèle Demessine, secrétaire d’État au Tourisme. Jean-Claude Gayssot a initié la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU), adoptée en 2000, imposant un pourcentage de logements sociaux pour les communes.
Il s’agit de la deuxième expérience d’un gouvernement de gauche depuis la Libération, après celle qui commence en 1981. Elle doit être replacée dans le contexte des années 1990, du mouvement social de 1995, mais aussi de la pression sociale-libérale exercée par l’Allemagne de Schröder, la Grande-Bretagne de Blair et les États-Unis de Clinton. La période est également celle de l’effondrement de l’URSS en 1991 et de la mise en place de l’euro après le traité de Maastricht (1992). Cette expérience est exemplaire en ce qu’elle accorde la prééminence à la majorité parlementaire dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques, dans le cadre d’une cohabitation avec un président de droite. Pour le PCF, il s’agissait de la première expérience de participation à un gouvernement français pendant toute une législature depuis sa création. À noter qu’en 1997, le Front national qualifie 130 candidats au second tour, en maintient dans 76 circonscriptions, contribuant à des triangulaires qui se soldent par la défaite de la droite parlementaire. Avec 14,9% des voix, le FN ne gagne qu’un siège ; quelques figures de la droite se compromettent alors avec l’extrême droite : Charles Millon en Rhône-Alpes, Jacques Blanc en Languedoc-Roussillon.
En savoir plus:
- Marie-Anne Cohendet, «Rétablir le lien entre pouvoirs et responsabilité du chef de l’exécutif», Silomag, n°14, janvier 2022.
- Jean Baudrillard, «La dissolution de l’Assemblée nationale par Jacques Chirac n’a rien d’un acte manqué. Au contraire, déresponsabilisé, il reste au sommet de l’État. Cette fois, la classe politique ne veut même plus du pouvoir», Libération, 16 juin 1997.
- Jean-Jacques Becker, «La gauche plurielle (1995-2002)», dans Histoire des gauches en France, La Découverte, 2005, pages 295 à 310.
- Gilles Candar, «La gauche au contemporain (1958-2021)», dans Pourquoi la gauche ? PUF, 2022, p. 187 à 236.